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Paris Texas Shoes

23 Fév

Après lecture du billet de imary, j’ai décidé de me pencher sur un des points mis en avant par ses soins. Il s’agit de la scène des chaussures dans Paris Texas. Ce moment où Travis pend les chaussures de toute la famille dans le but de les cirer. Il les aligne à l’extérieur, exposées en hauteur tel un rayon chaussurier. L’idée de Marie-Pierre avec laquelle je partage pleinement mon avis, c’est que  cette exposition suppose l’idée de la surconsommation.

A mon sens, c’est tout à fait cohérent il y a une série de paires placées les unes après les autres. Mais Marie-Pierre se pose une question par la suite : « Le fait de cirer toutes ces chaussures et d’ainsi les placer sur le béton les rend quelque peu ridicules. À quoi servent-ils vraiment d’autre que d’être montrés? » C’est cette question qui m’a fait réfléchir. Pour comprendre l’utilité de cette scène, son message, il faudrait savoir ce que représente la chaussure dans notre société. En 2005, aux Etats-unis, une étude dirigée par Russell Belk à l’université de l’Utah avait pour objet de recherche « Les chaussures et le soi« . Cette étude démontrait que la chaussure était un véritable marqueur d’identité.

Au début, quand il reste encore muet, il porte des chaussures qui n’ont plus grande utilité. Elles ne protègent que très peu les pieds de Travis, n’ont aucun style. Elles sont seulement rafistolées dans le but de maintenir la semelle.  (voir photo ci-dessous).

Dans l’étude citée précedemment, il est dit qu’ « Une bonne paire de chaussures peut entraîner une transformation magique et positive de soi. Comme pour la consommation en générale, la consommation des chaussures concerne non seulement la relation entre l’individu et l’objet, mais aussi les relations interpersonnelles, dont les chaussures sont les médiatrices. » Je dirais donc que le symbole de la chaussure n’est pas complètement anodin dans le film. Travis fait un échange contre son frère de ses chaussures neuves contre les anciennes Santiags. C’est une façon pour lui qu’il aurait de ne pas passer directement à la nouveauté et de garder un pied sur terre, les chaussures ayants une valeur d’authenticité parce que pas complètement neuves. (C’est presque le même type de troc qu’on retrouve entre l’avion et la voiture, Travis a peur de la brutalité du changement d’environnement, d’atmosphère. Et puis il y a encore une fois un rapport au temps : la rapidité en avion et le passé dans les vieilles santiags. ) Le symbole de la chaussure serait donc à mon sens, un indice de compréhension. Cet accessoire fait partie intègre de l’engrenage dans le processus d’évolution de Travis.

Autre chose : la chaussure comme objet de consommation. Dans notre cours sur la société de consommation, il est dit que l’objet de consommation était dans l’histoire amené à survivre et voir mourir ses propriétaires. Maintenant c’est le contraire, nos produits de consommation ont un cycle de vie et ne sont pas éternels. Travis les cire, il les entretient comme si son rapport à ces objets était très différent du nôtre. Il les expose en hauteur comme si elles avaient une importance et une valeur artistique. La protection de ces objets, ces chaussures est le signe que Travis est plutôt conservateur dans le sens où la nouveauté, le changement brutal n’est pas envisageable. C’est progressif, comme son évolution dans le film.
Un dernier point sur le statut social des possesseurs de ces chaussures : le frère et la belle-soeur de Travis. »Les chaussures sont les totems du désir désincarné. Elles sont des délices pour les yeux. Poésie pour les pieds, glaçage sur l’âme. Elles représentent tout ce que vous avez toujours voulu: glamour, succès, esprit bien aiguisé » Le fait que le couple en possède en quantité représenterait leur réussite sociale, la belle maison en Californie, l’enfant (bien qu’il ne soit pas à eux), la réussite en somme.
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